Projet de loi n° 78 – Loi visant principalement à améliorer la transparence des entreprises
Le 8 décembre 2020, le ministre Jean Boulet a présenté un projet de loi, que vous trouverez ci-joint, ayant été approuvé par l’ensemble des parlementaires. Ce Projet de loi n° 78 vise à prévenir l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent et la corruption en obligeant dorénavant les assujettis à déclarer des informations relatives aux personnes physiques qui sont les « bénéficiaires ultimes1 » des entités.
Ce projet de loi vise notamment à modifier la Loi sur la publicité légale des entreprises2 et toutes les personnes assujetties à celle-ci devront s’y conformer, ceci comprenant donc toutes les entreprises qui doivent s’immatriculer au Québec, tel que toutes les entités québécoises, mais aussi, sans en limiter la généralité, les sociétés par action de régime fédéral ou provenant d’autres législations.
Ce nouveau terme de « bénéficiaire ultime » est défini comme étant une personne physique qui satisfait à certaines conditions dont, notamment, détenir au moins 25 % de votes ou de la juste valeur marchande de toutes les actions d’une entité, et ce, même si cette détention est indirecte. Ceci vise donc indirectement les fiducies ou toute autre entité, que ce soit par prête-nom ou par toute autre forme détournée.
Divulgation des dates de naissance
En plus d’ajouter cette obligation de divulgation de bénéficiaires ultimes, il est important de comprendre que la personne physique qui est considérée comme bénéficiaire ultime devra également dévoiler sa date de naissance3 , laquelle divulgation sera publique sur le site du Registraire des entreprises.
Toutefois, afin de protéger certaines informations confidentielles, la personne physique qui sera considérée comme bénéficiaire ultime pourra déclarer une adresse professionnelle plutôt que son adresse personnelle lorsqu’elle se verra dans l’obligation de se déclarer comme bénéficiaire ultime aux fins de l’application de la loi.
Registre des « particuliers ayant un contrôle important » (fédéral)
Bien qu’il puisse s’agir d’une innovation québécoise qui devance toutes les provinces et qui fera en sorte que le Québec sera le précurseur de ce genre de nouvelles règles visant à améliorer la transparence des entreprises faisant affaires au Québec, il est à noter que les sociétés de régime fédéral constituée en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions4 doivent déjà répertorier un registre des « particuliers ayant un contrôle important » qui doit être communiqué aux organismes d’enquête5.
Recherche « inversée » au Registraire des entreprises
Fait à noter, en plus des nouvelles susmentionnées, le site du Registraire des entreprises sera adapté de façon que les recherches puissent être effectuées par « nom de personne physique ». De ce fait, en recherchant par nom de particulier, le public aura prochainement accès facilement à toutes les entités dans lesquelles cette « personne recherchée » est impliquée, directement ou indirectement. Il s’agit donc d’une forme de recherche qui améliorera grandement la transparence des entreprises puisqu’actuellement, nous ne pouvons chercher que par entité pour y constater à la pièce qui sont les impliqués, alors que prochainement, nous pourrons faire l’inverse. Or, en tapant un seul nom de particulier ou un bénéficiaire ultime, nous serons à même de générer une liste d’entités liées et de créer soi-même des organigrammes qui n’auraient pas été connus auparavant.
Prête-noms
La notion de « prête-nom » ou de « contrat simulé » est prévu dans le Code civil du Québec6 ce qui fait en sorte que son utilisation est permise par la loi. Fait important, sous réserve de plusieurs principes, les autorités fiscales pouvaient être liées dans les situations de prête-nom alors qu’elles étaient avisées de l’existence d’une situation simulée. Depuis peu, les situations simulées doivent obligatoirement être divulguées aux autorités fiscales par la complétion de formulaires7 afin de faire valoir des droits précis face aux dites autorités fiscales.
Évidemment, plusieurs tenteront de contourner l’application de la nouvelle obligation de divulguer les bénéficiaires ultimes qui prime sur les conventions de prête-nom. Officiellement, le but de la transparence recherchée par les nouveaux principes et de faire divulguer lesdits bénéficiaires ultimes, et ce, même s’ils sont « indirects ». Cela étant dit, nous en saurons plus lorsque la Loi sera appliquée à proprement dit. Nous demeurerons évidemment disponibles pour toute adaptation nécessaire en temps opportun. N’hésitez pas à communiquer avec le soussigné pour toute question ou complément d’information.
Me Mathieu Kellner, avocat
MK/lp
p.j. Projet de loi n° 78
1 Article 1 du Projet de loi 78 ajoutant l’article 0.3 à la Loi sur la publicité légale des entreprises
2 Chapitre P-44.1
3 Article 8 du Projet de loi 78 modifiant l’article 33 de la Loi sur la publicité légale des entreprises
4 (L.R.C. (1985), ch. C-44)
5 Articles 21.1 (1) et 21.31 (1)
6 Article 1451 du Code civil du Québec (chapitre CCQ-1991)
7 Au Québec : TP-1079.PN (2020-11)